Les pouvoirs publics claironnent que toute entreprise ayant souscrit un Prêt Garanti par l'État (PGE) peut dorénavant demander un étalement du remboursement sur une période allongée de deux ans à quatre ans supplémentaires[1]. Il nous parait utile de tempérer l’enthousiasme de la communication officielle.
On se rappellera que pendant la crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19, de nombreuses entreprises ont pu souscrire un PGE. Le remboursement de ces prêts pouvait s’étaler sur une période de six ans maximum[2]. Pour tenir compte des difficultés auxquelles font face certaines entreprises pour rembourser leur PGE à l’échéance, la faculté d’étalement du prêt a été portée à 10 ans maximum.
Même si cela peut aller de soi, il faut rappeler une évidence : la banque créancière est libre de faire droit à une telle demande d’étalement du remboursement du PGE ou, au contraire, de l’écarter et d’exiger le maintien de l’échéancier initialement convenu.
Certes, en cas d’accueil favorable du banquier, l’allongement de la durée de remboursement permet à l’entreprise d’augmenter sa trésorerie disponible. C’est indubitablement une bonne chose.
Il ne faut pas négliger pour autant l’effet du message de fragilité financière qui est envoyé à la banque. La banque créancière considérera nécessairement que l’entreprise débitrice n’est pas en mesure de rembourser le PGE conformément à l’échéancier initialement prévu.
Si la banque accepte de reporter l’échéancier de remboursement initialement prévu, le prêt restructuré tombera dans la catégorie des prêts « non performants »[3]. La banque sera alors obligée de déclarer cette restructuration à la Banque de France[4]. La Banque de France procédera à son tour à une révision de la cotation de l’entreprise concernée à la baisse. Il sera alors plus difficile pour l'entreprise d'obtenir de nouveaux crédits. Et pendant une « période probatoire » d’un an, l’entreprise ne pourra pas demander que sa cotation soit révisée à la hausse.[5]
Il n’y a malheureusement pas d’échappatoire à cet enchainement logique.
Par conséquent, il est peut-être judicieux – dans toute la mesure du possible – d’éviter la restructuration du PGE quitte à utiliser d’autres leviers financiers disponibles afin de ne pas affecter les facultés d’emprunt de l’entreprise pour l’avenir. Le rééchelonnement du PGE devrait, à notre sens, être envisagé comme une solution de dernier recours après avoir exploré des solutions de financement alternatifs comme le financement inter-entreprises par exemple.
[1] Déclaration de M. Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des finances et de la relance du 4 janvier 2022.
[2] Communication de la Commission Européenne sur l’encadrement temporaire des mesures d’aide d’État visant à soutenir l’économie dans le contexte actuel de la flambée de COVID-19 du 20 mars 2020.
[3] Si la restructuration entraîne une variation de plus de 1 % de la valeur actuelle des flux de remboursement avant et après restructuration (Banque de France, Comité Directeur Confédéral du mercredi 16 février 2022).
[4] Lignes directrices pour les banques en ce qui concerne les prêts non performants – Banque centrale Européenne – Mars 2017.
[5] FAQ - Prêt garanti par l’État - Quelles démarches pour en bénéficier ? (Version en date du 7 avril 2022)
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